Les vols spatiaux habités

Les vols spatiaux pilotés ont connu une mutation considérable depuis les exploits des années 60, passant de missions courtes effectuées dans des cabines exiguës à des vols de plus d’un an dans de vastes stations orbitales. Voyons en quoi ces vols habités sont si difficiles à mettre en œuvre.

Sommaire:

1. Une présence humaine et technologique coûteuse mais indispensable

Lancer des sondes automatiques en orbite terrestre ou vers les planètes lointaines implique déjà une grande maîtrise technique, mais ce sont des opérations relativement simples au regard de l’extraordinaire complexité des vols spatiaux pilotés. A la différence des charges utiles automatiques, qui sont couvertes par de simples assurances et dont la perte n’est pas dramatique en soi, les vols pilotés imposent, de par la présence humaine, une fiabilité à toute épreuve : aucun risque d’accident ne peut être toléré. Les principaux systèmes du lanceur et de la cabine pilotée sont donc doublés, parfois triplés, afin d’éviter toute panne grave, cette multiplication offrant les meilleures garanties de sécurité. C’est ainsi que la navette spatiale américaine dispose de 4 ordinateurs qui assurent en parallèle tous les calculs et comparent en permanence leurs résultats afin d’écarter le moindre risque d’erreur.

Outre cette complexité accrue des circuits destinée à minimiser les pannes, les vols pilotés ont rendu nécessaire la mise au point des systèmes de secours au cas où, malgré toutes les précautions prises, un incident parviendrait à se déclarer. Des systèmes d’éjection de l’équipage pendant la phase de décollage, voire des cabines spéciales permettant un retour d’urgence en cas de panne en orbite, figurent dans nombres de programmes pilotés présents et à venir.

Les vols pilotés n’exigent pas seulement une fiabilité extrême des lanceurs et des modules orbitaux : ils doivent aussi offrir une infrastructure permettant aux hommes de vivre dans l’espace, et prévoir des réserves d’eau pour leur alimentation et d’oxygène pour leur respiration. Ajoutés aux autres charges utiles comme les aliments, les produits pharmaceutiques, les vêtements et autres scaphandres, ces systèmes prennent beaucoup de place à bord des modules spatiaux et représentent une masse importante. En astronautique, où chaque kilogramme en orbite est extrêmement onéreux, l’envoi d’un homme dans l’espace exige des financements importants. Certaines solutions ont été envisagées pour réduire ces coûts de fonctionnement, et notamment le premier vaisseau spatial américain réutilisable, la navette spatiale.

Pour toutes ces raisons, les vols pilotés ne font pas l’unanimité parmi les décideurs et les responsables de programmes. Certains leur préfèrent les vols automatiques, moins coûteux et sans risques pour l’homme. Mais, malgré les progrès de la robotique, la présence d’astronautes dans l’espace s’est avérée précieuse pour effectuer les réparations, les prises de décisions rapides et les improvisations que réclament toutes missions, qu’elle soit scientifique ou purement technique.

2. L’entraînement des astronautes

En raison de la complexité des vols spatiaux, la sélection et l’entraînement des astronautes sont conduits avec la plus grande rigueur.

A l’époque héroïque des premiers vols pilotés, les astronautes étaient recrutés parmi les pilotes de chasse, habitués aux très fortes accélérations et aux prises de décisions rapides dans un environnement hostile. Un entraînement intensif en centrifugeuse pour simuler l’accélération des fusées, et en piscine pour simuler l’état d’apesanteur, faisait partie de leur préparation quotidienne.

Aujourd’hui, si les entraînements en piscine sont toujours aussi indispensables pour préparer un vol en orbite, les tests d’endurance physique offrent moins d’intérêt, car l’accélération des fusées est moins importante qu’autrefois : alors que les fusées Redstone et Atlas engendraient des accélérations proches de 15 kg (15x la pesanteur terrestre), les astronautes de la navette spatiale subissent des accélérations inférieures à 5g.

3. Les sorties dans l’espace.

Figure 1 - L'astronaute Bruce McCandless lors d'une sortie extravéhiculaire

Figure 1 - L'astronaute Bruce McCandless lors d'une sortie extravéhiculaire

Protégés dans les cabines et les stations par un environnement pressurisé et climatisé, les astronautes doivent revêtir des scaphandres dès lors qu’ils sont amenés à quitter leur vaisseau spatial et à travailler dans le vide du cosmos. Avant une sortie extravéhiculaire, les astronautes de la navette spatiale doivent ainsi endosser des sous-vêtements cousus de minces tubes en plastique par lesquels circule un liquide réfrigérant qui est destiné à évacuer la chaleur du corps.

Le scaphandre lui-même comprend des couches internes en nylon et autres fibres synthétiques, recouvertes de couches en plastique alumineux qui servent d’isolants thermique et protègent l’astronaute des violents contrastes de température existant dans l’espace entre les zones ensoleillées (180°C) et celles à l’ombre (-150°C). Enfin, les couches externes du scaphandre sont tissées de Téflon (matière plastique fluorée résistant à la chaleur et à la corrosion), Kevlar (fibre aramide légère, robuste et très résistante au feu et à la corrosion) et autres Nomex, qui donnent à l’ensemble sa rigidité et sa résistance à l’usure, aux déchirures, à l’impact des micrométéorites et autres dangers qu’on peut rencontrer dans le cosmos.

Le scaphandre de sortie est équipé d’un sac à dos contenant les réserves d’oxygène (6 heures d’autonomie), la climatisation à eau et le filtrage des gaz expirés, ainsi que les batteries d’alimentation et le système de communication radio. Pendant leurs marches dans l’espace, pour réparer des systèmes ou récupérer des expériences à l’extérieur de la cabine, les astronautes peuvent se déplacer en s’agrippant à des poignées et à des rails prévus à cet effet, ou au moyen de « fauteuils volants » équipés de petits réacteurs à gaz pressurisé que l’astronaute commande par des manettes disposées sur les bras du fauteuil.

Sources & bibliographie :